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Architecture : le béton, un "rebelle" écolo au service de l’audace







21 Août 2017

Le béton inspire l’imaginaire des architectes, qui sont prêts à relever tous les défis techniques pour s’inscrire en résonance avec l’évolution des villes.


La résille de béton du MUCEM à Marseille
La résille de béton du MUCEM à Marseille
Matière sublimée par les architectes, le béton est un matériau qui n’en finit plus de surprendre. Depuis le premier immeuble terrasse en béton coulé avec fers profilés enrobés, réalisé en 1852 par François Coignet à Saint-Denis en Ile-de-France, les réalisations architecturales se font toujours plus audacieuses sur les plans technique, esthétique et environnemental.  
 
Témoignage de cette créativité et des savoir-faire : la transformation de la gare de Nantes par l’architecte Rudy Ricciotti, un inconditionnel du béton. Le verre et le béton sont unis et conçus comme « une rue, une grande fenêtre sur la ville ». Ou bien encore le musée Jean Cocteau à Menton. Ricciotti l’a pensé « en empathie » avec « les rues », « la mer » et « le trait délié du poète ». « J’avais en mémoire la Belle et la Bête. Pieuvre, chevelure, chandeliers, mouvements argentés et lumineux  sont devenus des allégories pour un récit architectural en hommage à l’artiste ».
 
Des spécifications techniques et esthétiques
 
L’assemblage fait de matières minérales et inertes confère au béton des propriétés incomparables recherchées par les maîtres d’ouvrage et les architectes : durabilité, stabilité statique et dynamique, tenue au feu, inertie thermique, acoustique, esthétique. En plus de ses qualités physiques et mécaniques, indispensables pour satisfaire les contraintes constructives, sa malléabilité est même plébiscitée : le béton peut être moulé en atelier, coulé sur site pour s’adapter aux différents types d’ouvrage et aux conditions de mise en œuvre sur les chantiers.
 
Selon la sélection des composants, le dosage et l’ajout de pigment, il peut prendre toutes les formes, offrir toutes les teintes ainsi qu’une multitude d’aspects. Pour l’architecte Claude Parent, « Le béton libère l’imagination. Le béton sortant brut de son moule traduit la réalité de sa nature, de sa structure, de sa matière: le béton apporte la franchise de l’expression. Le béton ayant la possibilité de modifier son aspect final suivant la composition, la paroi du coffrage, le traitement de surface, il propose aux architectes une variété infinie d’états de surface: le béton permet le jeu des apparences. »
 
Pousser à l'innovation
 
De nombreuses innovations ont révolutionné les constructions en béton ces dernières années, parmi lesquelles figurent les « Bétons Hautes Performances (BHP) », les « Bétons Autoplaçants (BAP) » et les « Bétons Fibrés à Ultra Hautes Performances (BFUHP) ».
 
Pour l’architecte Giovanni Lelli, « le béton est un résistant, un rebelle même. C’est la seule matière plastique restant à disposition des constructeurs. Elle permet toutes les formes. C’est une matière de liberté. Peut-être la dernière liberté dans le bâtiment…La place illimitée définie par l’ADN des architectes les poussent à se renouveler constamment, les poussent à rechercher sans cesse d’autres idées, cocktails, mélanges, qui les pousse à fuir l’ennui de solutions types rassurantes et lénifiantes. L’innovation n’est pas très valorisée par les carcans administratifs…Les entreprises volontaires déterminent un budget R&D (Recherche et Développement). Les chantiers sont donc un domaine où une part d’expérimentation devrait être facilitée, attendue, comprise. » (1)
 
Des objectifs environnementaux 
 
La tendance est à l’architecture « soft tech » dans une démarche de « haute qualité environnementale (HQE)». Cette conception repose sur une architecture vernaculaire fondée sur la limitation des dispositifs techniques pour privilégier les qualités intrinsèques du bâtiment. Cette simplicité favorise ainsi une constance des performances énergétiques, la lumière naturelle, la ventilation naturelle, l’inertie thermique et la qualité acoustique.
 
En charge de la réalisation du lycée Victor Hugo à Lunel certifié HQE à la demande de la région de l’Occitanie, l’architecte Pierre Tourre a choisi le béton. « La région de l’Occitanie, maitre d’ouvrage du lycée de Lunel tient à inscrire ses projets dans le cadre du développement durable. Ce nouveau lycée concrétise un bâtiment conçu et construit selon une démarche « haute qualité environnementale » (HQE). Le choix de recourir au béton est ici primordial pour apporter au bâtiment une bonne inertie thermique. En hiver, ce matériau absorbe la chaleur de la journée et la restitue la nuit par conduction. En été, il accumule la fraicheur de la nuit et fait baisser la température pendant la journée». Pour éviter les surchauffes en été, Pierre Tourre a également réalisé un puits canadien, « une galerie souterraine de 2 mètres de haut sur 1 mètre de large, et longue de 300 mètres » qui permet d’assurer une ventilation naturelle et confortable tout au long de l’année.
 
Des exigences règlementaires
 
Ce matériau fait l’objet de recherches toujours plus poussées pour répondre aux nouveaux défis techniques liés aux exigences règlementaires. La dernière certification NF Béton prêt à l’emploi évolue avec les normes, et notamment au début de l’année 2015 selon la norme NF EN 206/CN.
 
Et, Benjamin Chevillon, ingénieur certification AFNOR Certification, de préciser : « En septembre 2016, des exigences complémentaires ont été ajoutées. Il s’agit de la certification de la classe de conductivité thermique des bétons. En effet, de nouveaux types de bétons légers possèdent des propriétés isolantes permettant une meilleure performance thermique globale des bâtiments ».
  1.  ITV au journal Ingénierie Territoriale - novembre 2016.