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Le mécénat cardiaque en France : tenants et aboutissants







28 Mars 2013

En France, un enfant sur cent naît avec une malformation cardiaque, soit avec une des deux cents malformations congénitales impossibles à détecter sans une batterie d'analyses pointues et coûteuses. Leur prise en charge demande, par la suite, une médication très lourde financièrement. Pour les parents et les associations qui les encadrent, le mécénat apparaît comme la principale source de financement.


Les malformations cardiaques de plus près

Le coeur humain vu par l'anatomiste Jean-Baptiste Marc Bourgery
Le coeur humain vu par l'anatomiste Jean-Baptiste Marc Bourgery
Pendant longtemps, seul un quart des enfants atteints de malformations cardiaques, également appelées cardiopathies congénitales, atteignait l'âge adulte. Aujourd’hui, par les progrès de la génétique, plus de 40% des maladies cardiaques peuvent être traitées efficacement sans intervention chirurgicale. Dans les cas spécifiques nécessitant une opération rapide, les nourrissons peuvent être opérés dès la naissance afin d'éviter de potentielles complications ultérieures, ou tout au moins en vue de les limiter.
 
Les malformations cardiaques, nombreuses, peuvent affecter différentes zones du cœur et générer différents dysfonctionnements. D'une manière simple, une maladie de ce type, générée par l'absence de développement, avant la naissance, des vaisseaux sanguins à proximité du cœur, empêche ce dernier de remplir son rôle essentiel : pomper le sang pour le diriger vers les poumons, l'oxygéner et le redistribuer aux organes. Les malformations cardiaques congénitales peuvent recouvrir des conséquences telles que des obstructions à l'écoulement sanguin (aortique, sténose pulmonaire...), des problèmes de communication entre les cavités cardiaques, des malformations septales (ou trous dans le coeur) ou encore des cardiopathies cyanogènes (tétralogie de Fallot, maladie d'Ebstein...).
 
Dépistables par cathétérisme cardiaque, radiographie thoracique, échocardiogramme, IRM cardiaque et électrocardiogramme, elles peuvent être traitées par des médicaments (bêtabloquants, Digoxine, diurétiques...), des interventions non chirurgicales (cathétérisme), ou chirurgicales dans certains cas (greffe cardiaque). L'accompagnement médical est à prévoir sur toute la vie du patient, de sa prise en charge à l'enfance jusqu'à l'âge adulte, où des examens et tests doivent demeurer réguliers.
 
Tout ceci demande un encadrement médical très précis et un suivi psychologique des parents (et des enfants) de tous les instants. Différentes associations se sont spécialisées dans la collecte de fonds destinés à opérer et prendre en charge ces patients, et à sensibiliser l'opinion publique. De nombreuses campagnes voient régulièrement le jour afin d'alerter sur cette pathologie et ses implications. Une journée nationale d'information lui est dédiée dans le monde : le 14 février.
Les associations, nombreuses (ANCC, Mécénat Chirurgie cardiaque Enfants du Monde, Association Coeur d'Enfants, Heart and Coeur...), jouent un rôle majeur dans l'information et l'accompagnement des familles. Il est également important de souligner leurs actions à l'étranger. L'association Mécénat Chirurgie Cardiaque travaille avec soixante pays, où des médecins référents sont chargés de travailler au dépistage de cardiopathies. Laos, Burundi, Syrie, Togo, Gabon, Bénin, Mali... : les enfants dépistés dans ces pays sont alors orientés vers des encadrements sur le territoire français.
 
Se pose, dans tous les cas, la question du financement : une opération cardiaque et ses suites coûtent cher (autour de 20 000€). Comment ces associations peuvent-elles s'assurer de leur fonctionnement et de leur survie sinon avec l'aide du mécénat?

Une large mobilisation qui peine à trouver écho dans les médias

En premier lieu se pose la question de la médiatisation du problème. Comment, en plus des campagnes, sensibiliser directement le grand public et générer leur adhésion (et souvent, leur soutien financier) de manière simple et permanente ? Les vedettes, chanteurs, sportifs, humoristes, acteurs, mannequins etc. sont généralement un excellent support de médiatisation. Nombreuses sont les personnalités qui parrainent des associations tournées vers les maladies rares et graves (Zinedine Zidane avec ELA, Nicola Sirkis avec l'Association du Craniopharyngiome, Franck Dubosc avec Les Bonnes Oeuvres du Coeur etc.)
 
En second lieu se pose la question financière, une fois la problématique connue du grand public. Les entreprises françaises jouent un rôle majeur mais pourtant méconnu auprès de ces associations, car 42% des ressources de celles-ci proviennent directement du mécénat d'entreprise. Les partenariats sportifs sont également une excellente source de récolte de fonds, comme le Marathon de Paris ou le Tour de France auxquels Mécénat Chirurgie Cardiaque est associé avec l'opération Kilomètres du Coeur et Etape du Coeur.
 
Les entreprises qui soutiennent financièrement une association comme Mécénat Chirurgie Cardiaque sont plus d'une quarantaine. De taille, de secteurs différents, elles n'en demeurent pas moins ancrées autour d'une même citoyenneté. Ainsi Skiset et Carrefour, engagés auprès de l'association depuis, respectivement, 2002 et 2003, participent à des opérations de vente de produits dérivés (pin's, cartes, petits oursons en peluche...). Skoda soutient, depuis 2007, la grande course cycliste "Les 10h du coeur", Vittel fournit les bouteilles d'eau lors des événements sportifs, Baccarat réalise des coeurs en cristal dont les profits des ventes bénéficient directement à l'association. Ces exemples soulignent l'étroite corrélation entre les associations et les entreprises engagées dans une démarche à la fois citoyenne et humaine, et la manière dont leur participation dynamise un combat permanent comme celui de la lutte contre la cardiopathie.
 
A l'heure où les subventions gouvernementales sont limitées envers les associations, la santé de ces organismes et des personnes qu'elles aident est avant tout due, il faut bien le reconnaître, aux entreprises. Cette tendance tend à se répandre en France, pays où le mécénat d'entreprise est encore timide et récent, comparé aux Etats-Unis où le principe même est en place depuis des années. Il connaît une excellente progression en France : en 2010, 43% des entreprises de plus de 200 salariés pratiquent le mécénat d'entreprise contre 26% en 2008.  De bons chiffres pour les associations solidaires, qui n'attendent plus qu'un coup de pouce supplémentaire de l'Etat !