Optic 2000 et la communication : le changement dans la continuité ?






20 Décembre 2013

Passer, comme porteur d’image, de Johnny Hallyday à Yann Arthus-Bertrand, Maud Fontenoy peut être perçu – du premier abord néanmoins – comme un grand écart. Pour autant, aucune incohérence, mais plutôt « une recentrage fondamental sur les valeurs qui animent l’entreprise », selon Didier Papaz, le Président de l’enseigne.


Yann Arthus-Bertrand succède à Johnny Hallyday comme nouveau porte étendard de la marque Optic 2000. Photo : Erwan Sourget
Au revoir, Johnny Hallyday. Bonjour Yann Arthus-Bertrand ; bonjour Maud Fontenoy. Dans la communication d’Optic 2000, la star éternelle de la chanson française est progressivement remplacée par le photographe, chantre du développement durable et la navigatrice, protectrice emblématique des océans.
 
Ce passage de témoin pourrait sembler anodin sur la réalité de l’entreprise. Il n’en est rien dans la mesure où Optic 2000 est une entreprise en réseau, un regroupement d’opticiens indépendants. Son mode d’organisation coopératif est à la fois une force et une spécificité qui imprègnent profondément  la culture de l’Enseigne et ancrent ses associés dans la cité.  La personnalité qui incarne ce réseau auprès du grand public, des consommateurs, impacte également la culture d’entreprise qui soude les membres du réseau. Cette culture d’entreprise qui est « un ensemble de références partagées dans l'entreprise, consciemment ou pas, qui se sont développées tout au long de son histoire », comme l’explique, Maurice Thévenet, auteur de La culture d'entreprise (PUF) et Professeur à l’ESSEC ainsi qu’au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM).
Dans ce contexte, le changement d’image est donc assez risqué. « Une culture d'entreprise forte peut ne pas être adaptée aux défis qu'elle a à relever », estime ainsi Maurice Thévenet. Comment ce virage assez délicat a-t-il été négocié dans le cas d’Optic 2000 ? Pour répondre à cette question, il convient de revenir à l’histoire des deux nouveaux ambassadeurs.
 
Est-il pourtant besoin de présenter Yann Arthus-Bertrand ? Ce grand photographe a parcouru la planète pendant une vingtaine d’années et l’a vue changer. Pas forcément en bien. Il se découvre en « combattant contemplatif ». En 1992, le contemplatif lance un grand projet photographique, la Terre vue du ciel, destiné à rendre compte de l’état du monde et de ses habitants. Il le décline en une série télévisée et un film, avant de se focaliser sur les enjeux humains et environnementaux de la problématique de l’eau au travers de deux films. Le combattant met gratuitement à la disposition des réseaux éducatifs, des institutions publiques et des O.N.G. l’ensemble de ses photos et de ses films afin que chacun prenne conscience de la fragilité de notre monde. Le combattant créé une fondation, GoodPlanet, qui incite à un mode de vie plus respectueux de la terre et de ses habitants et finance des opérations de gestion des déchets et d’agriculture responsable, la construction d’écoles bioclimatiques ainsi qu’un ambitieux programme de préservation des océans.
 
Maud Fontenoy, elle, a accompli des exploits dont peu peuvent se targuer.  Première femme à avoir traversé l’océan Atlantique à la rame dans le sens ouest-est, elle est également la première femme à traverser l’océan Pacifique à la rame sans assistance. Enfin, elle réalise le tour de l’hémisphère Sud à la voile est à contre-courant après avoir réparé, dans la nuit, son embarcation qui avait démâté au large des côtes australiennes. Cette femme d’exploit est également, comme Yann Arthus-Bertrand, une personne de conviction. Elle créée une fondation pour préserver les océans avec laquelle elle mène des actions d’éducation à l’environnement marin.
 
Dans un monde qui change, Maud Fontenoy et Yann Arthus-Bertrand portent haut des valeurs de citoyenneté – tous deux veulent agir à grande échelle - afin que, demain, chacun puisse vivre dans les meilleures conditions. C’est probablement ce qui explique que leur engagement ait séduit l’opticien qui prône justement, à travers sa nouvelle communication, une « nouvelle vision de la vie ». En effet ce réseau d’opticiens créé en 1962, a choisi de fonctionner sur un modèle coopératif et de mettre en œuvre un mode de gouvernance fondé sur la solidarité, au sens large.
 
C’est en tout cas une idée que promeut encore aujourd’hui Yves Guénin, le secrétaire général du groupe : « Les Français réclament de la solidarité. La question est de savoir comment la construire. Nous, dirigeants d'entreprise qui sommes dans le réel, nous pouvons, j’en suis certain, avancer des idées concrètes pour la mettre en œuvre sur le terrain en partant de notre expérience. » Une posture que ne renie pas Didier Papaz, le Président d’Optic 2000, pour qui une entreprise a vocation à « se rendre utile partout où ses compétences et ses moyens peuvent être mobilisés à bon escient ». Ainsi, explique-t-il, « La fondation de Yann [Arthus-Bertrand], GoodPlanet, a pour objectif de sensibiliser l’opinion aux problématiques écologiques par l’image, et comme toute fondation, elle a besoin de moyens pour agir. Or, comme toute entreprise, nous avons aussi une responsabilité environnementale, et nous avons considéré que la « nouvelle vision de la vie » que nous prônons est indissociable de modes de production et de consommation plus responsables. Le développement durable est un concept qui englobe aussi bien le social, que l’écologie ou les questions éthiques. »
 
Le changement d’image, chez Optic 2000 comme chez d’autres entreprises qui ont accompli cette même mue, correspond finalement à un moment de l’organisation. « Une culture forte motive les gens si elle s'appuie sur un fonctionnement cohérent qui, de plus, leur correspond », remarque Maurice Thévenet. Les deux dirigeants  d’Optic 2000 l’ont, semble-t-il, entendu avec profit : « lorsque nous nous sommes interrogés sur notre identité profonde, et sur ce qu’elle implique aux yeux du public, nous nous sommes rendu compte que ce même public ne pouvait prendre la mesure de la dimension coopérative et humaine d’Optic 2000. » […]. Et de conclure - ne leur en déplaise !- à l’intention des mauvais esprits : « Il n’y a donc ni rupture ni éparpillement, mais plutôt une transition vers une communication qui nous ressemble plus fidèlement et plus concrètement. » Dont acte !